Pendant une quinzaine d’années, Dominique Watrin a publié mensuellement sur ce site une chronique « coup de poing » sur une sujet majeur (ou mineur) inspiré par l’actualité chaude (et quelquefois simultanément glaciale) du mois. Ces textes parfois repris sur les planches pour des cours de seul-en-scène, parfois même étudiés dans les écoles, mêlaient faits de société, vérité pas bonne à dire et mauvaise foi à peine dissimulée, le tout sous une forme courte, choc, mais incroyablement digeste. À lire ou à relire… pour le plaisir ou le déplaisir !
Comme on disait, récemment, du côté de Tubize, Wavre ou Deux Acren : « Il ne faut jamais dire « Rivière, je ne boirai pas de ton eau ! » ». Et ce n’est pas parce que je n’ai pas été inondé que je dis ça, mais les gens dramatisent vite pour quelques gouttes de pluie. D’accord, certains ont perdu tout leur mobilier, mais, d’après ce que j’ai vu à la télévision, beaucoup d’intérieurs inondés étaient vraiment de très mauvais goût. Il n’y a pas de hasard ! Je l’ai vu personnellement : des meubles empilés n’importe comment dans le coin d’une pièce, on ne pas peut appeler ça un intérieur bien tenu. Des sacs de sable jetés partout n’importe comment devant le hall d’entrée, désolé, ça ne donne pas envie d’entrer boire une tasse de café. Sans compter la boue : on la nettoie vite parce que la caméra filme, mais n’allez pas me dire qu’ils ne peuvent pas s’essuyer les pieds en rentrant du jardin !
Alors, arrêtons de pleurer, je vous en prie, ça fait monter le niveau des eaux. Positivons plutôt !
- D’abord, sur le plan de la circulation, ces inondations auront permis de noyer définitivement les moteurs des voitures des vieux conducteurs du dimanche qui, de toute façon, les noyaient déjà eux-mêmes en démarrant et, surtout, de nettoyer les rails de chemin de fer des feuilles mortes qui empêchaient certains trains de rouler, à une période où pas un seul des 20.979 membres du personnel de la SNCB n’avait le temps de balayer ces rails, entre deux parties de belote.
- Ensuite, quand on songe que, statistiquement, 19% des Belges ne changent pas de slip tous les jours, on peut remercier le ciel de ces pluies torrentielles qui auront permis de remettre à jour pas mal de retards de lessive, en mettant au trempage non seulement ces slips, mais aussi ce qu’ils contiennent. On peut même se féliciter des zones, hélas trop peu nombreuses, où la montée des eaux aura permis de laver les dents des 10% de la population qui ne le font jamais, même si on peut imaginer que ces indécrottables malpropres auront poussé la mauvaise volonté jusqu’à fermer la bouche à la montée des eaux.
- Enfin, ayons une pensée émue pour le soulagement de tous les parents infanticides obligés de conserver leurs nouveaux-nés non désirés dans leur congélateur à la cave, et qui ont vu ceux-ci quitter le cocon familial grâce aux inondations. Ces gens ont enfin récupéré un peu de place pour se racheter des friskos et les petits ont pu prendre l’air au lieu de rester enfermés.
De grâce, ne boudons donc pas notre plaisir et gardons tous en mémoire le célèbre dicton : « Si tu offres un poisson à un Belge inondé, il prendra la mouche. Si tu lui apprends à pêcher, il retrouvera ses meubles. ».