Un bon coup de Gueule

Le coup de gueule du mois

Pendant une quinzaine d’années, Dominique Watrin a publié mensuellement sur ce site une chronique « coup de poing » sur une sujet majeur (ou mineur) inspiré par l’actualité chaude (et quelquefois simultanément glaciale) du mois. Ces textes parfois repris sur les planches pour des cours de seul-en-scène, parfois même étudiés dans les écoles, mêlaient faits de société, vérité pas bonne à dire et mauvaise foi à peine dissimulée, le tout sous une forme courte, choc, mais incroyablement digeste. À lire ou à relire… pour le plaisir ou le déplaisir !

Ma lettre de rupture

C’est dur de faire souffrir ! Je viens de provoquer innocemment mon premier grand chagrin d’amour, en profitant de la rédaction de mes cartes de vœux pour rompre avec une fille, comme ça, j’économisais un timbre.  Je vous dévoile cette lettre, en comptant sur votre tact.

Chère Carla,

Tu m’écris : « Quelqu’un m’a dit que tu m’aimes, mais encore… Serait-ce possible, alors ? ». Qu’est-ce que tu me chantes là ? Désolé, je te le répète : rien n’a JA-MAIS collé entre nous, sauf nos salives.  Des exemples ? Tous ces cheveux qui bouchent le lavabo, c’est moi sans doute ? Les strings qui sèchent dans le jardin et qui obligent ma voisine Fernande à faire un signe de croix chaque fois qu’elle va se couper une salade, c’est ma taille peut-être ? Et ces invitations lascives dont tu me harcèles à toute heure du jour et de la nuit ? Je ne suis pas qu’un corps, Carla, je mérite un peu de respect et de tendresse.  Et puis, il n’y a pas que le cul dans la vie ; il y a aussi… euh… euh… le sexe.

D’accord, tu es pas mal, Carla, mais il me semble que tu commences à avoir un petit peu de ventre.  Pour quelqu’un qui se prétend ex-modèle, sorry, tu n’es plus au top !
(là, j’ai mis « humour » entre parenthèses; elle n’est pas très futée…)  La dernière fois que tu t’es pesée, j’ai feint de t’embrasser les seins pour regarder la balance sans attirer ton attention et j’ai découvert ce que je craignais : tu as passé la barre des 51 kilos.  Pour 1mètre82, à 39 ans à peine, il faut regarder la réalité en face : tu te laisses aller, Carla.  Non seulement, tu risques des problèmes cardiovasculaires, mais je n’ai sincèrement pas envie de me balader au carnaval de Binche, devant tous mes copains du patrimoine de l’humanité, avec un boudin qui traîne ses grammes en trop.  Sois vigilante : de mannequin Dior à mannequin Damart, la chute est parfois rapide !

C’est vrai, ma petite Carla, tu es grande.  Mais moi, je suis TRES grand.  Tu trouveras bien un garçon plus à ta taille.  En fait, ce qu’il te faut, Carla, c’est un type humble, discret, casanier, qui ne t’écrasera pas, comme moi, du poids de son intelligence et qui prendra le même plaisir que toi à flâner chez Colruyt et à y découvrir avec émerveillement que ton colis est arrivé au Collishop.  Je le disais encore, l’autre jour, à Benazir, avant de l’envoyer péter : « La vie est trop courte ; tu dois t’éclater ! ».  Adieu, Carla !



Created by pixFACTORY