Pendant une quinzaine d’années, Dominique Watrin a publié mensuellement sur ce site une chronique « coup de poing » sur une sujet majeur (ou mineur) inspiré par l’actualité chaude (et quelquefois simultanément glaciale) du mois. Ces textes parfois repris sur les planches pour des cours de seul-en-scène, parfois même étudiés dans les écoles, mêlaient faits de société, vérité pas bonne à dire et mauvaise foi à peine dissimulée, le tout sous une forme courte, choc, mais incroyablement digeste. À lire ou à relire… pour le plaisir ou le déplaisir !
C’est un scoop, après le scandale des magouilles dans le football belge, la RTBF a aussi vacillé sur ses bases : j’ai failli être transféré sur TF1. Je peux le révéler aujourd’hui : j’ai passé le casting de l’émission « Danse avec les stars » et j’ai été à deux doigts d’y être ovationné… mais à deux gros doigts quand même ! En fait, ma grosse erreur, je l’ai commise au moment du choix de la danse à interpréter. Quand j’ai entendu les autres concurrents annoncer des danses avec des noms exotiques que je ne connaissais même pas comme mambo, merengue ou bachata, j’ai réfléchi très vite et, pour ne pas avoir l’air moins malin que les autres, j’ai proposé la seule danse étrangère que je connais : la bamba !
Je le sais maintenant, dans « Danse avec les stars », il y a les stars et il y a les autres. Et ils commettent parfois des erreurs incroyables parce que, moi, ils m’avaient inscrit dans la colonne des autres. Je sais que mon déhanchement a troublé pas mal de jeunes filles à une certaine époque au souper aux moules de mon quartier, mais je me suis rendu compte à TF1 que, sans les bières, mon chaloupement est beaucoup moins hypnotique. Dès que j’ai entamé mon numéro, j’ai tout de suite senti que le jury était médusé. Et la partenaire qu’on m’avait imposée aussi. Quand je l’ai empoignée par les épaules et que j’ai commencé à tourner en rond en criant « Changez ! » tous les dix tours comme dans les farandoles de chez nous, personne n’a bronché. Ils ont cru que je m’échauffais. Et ils n’ont pas été déçus. Moi, je suis conditionné comme ça : après la bamba, c’est toujours les slows. Lorsque la musique a stoppé, comme leur empoté de disc-jockey que je ne voyais pas n’a rien lancé, j’ai empoigné ma partenaire par la taille et j’ai entonné à tue-tête « Capri, c’est fini ». Et là, sans me vanter, ça a été « La fièvre du samedi soir »… sauf qu’on était jeudi.
Ma partenaire, pas de problème, je l’ai gérée. J’ai agrippé les bretelles de sa robe comme des sangles de parachute pour l’empêcher de s’échapper. Et, comme elle avait la poitrine de Pamela Anderson, mais quarante centimètres plus bas vu son âge, on était emboîtés comme des modules « Île de Paix ». Le souci, ça a été le costume de scène qu’ils m’avaient imposé. Vu que, je ne sais pas si je vous l’ai dit, je remplaçais Charles Aznavour qui avait accepté de participer mais qui n’avait plus donné signe de vie, le pantalon était beaucoup trop petit. C’est au niveau de la fermeture éclair que ça a fléchi.
Quand, alerté par la tête horrifiée de ma partenaire, j’ai vu que mon coffret de secours laissait sortir ma lance d’incendie, si vous comprenez l’image, j’ai dû improviser. En un éclair, j’ai lâché ma cavalière, j’ai rabattu ma chemise sur ma quincaillerie et j’ai rattrapé ma partenaire, sauf que c’était un poil trop tard : elle se réceptionnait déjà au sol avec ses dents. Je crois que c’est cette imprécision dans le tempo qui a joué en ma défaveur. Ils m’ont viré. Je peux maintenant le dire d’expérience : dans cette émission, même le casting est truqué.