Pendant une quinzaine d’années, Dominique Watrin a publié mensuellement sur ce site une chronique « coup de poing » sur une sujet majeur (ou mineur) inspiré par l’actualité chaude (et quelquefois simultanément glaciale) du mois. Ces textes parfois repris sur les planches pour des cours de seul-en-scène, parfois même étudiés dans les écoles, mêlaient faits de société, vérité pas bonne à dire et mauvaise foi à peine dissimulée, le tout sous une forme courte, choc, mais incroyablement digeste. À lire ou à relire… pour le plaisir ou le déplaisir !
Ça m’arrive rarement mais, à l’heure qu’il est, je suis un peu gêné ! Les services secrets wallons, dont je suis un des rares à connaître l’existence puisque je suis ami avec eux sur Facebook, m’ont demandé de vous informer confidentiellement qu’il vient d’y avoir un petit problème avec les deux pandas prêtés par la Chine à Pairi Daiza. En fait, il y a eu une énorme méprise botanique de leur soigneur. Cet homme de toute confiance, puisqu’il était, jusqu’il y a quelques semaines, le gardien de la panthère des neiges au Monde Sauvage d’Aywaille, a confondu et, au lieu de leur donner du bambou pour les nourrir, leur a donné du bouleau. C’est une malencontreuse erreur hélas classique en Wallonie où on a toujours l’habitude d’offrir son bouleau aux autres. Depuis lors, les deux pandas sont dans un coma végétarien, un peu comme Michaël Schumacher, mais en pire.
Or, il faut rappeler que les pandas en Chine, c’est comme la sieste en Wallonie : c’est sacré ! Pour éviter l’envoi de missiles sur Pairi Daiza ou Plopsa Coo de la part de la Chine à laquelle on doit restituer les pandas dans quinze ans alors qu’ils sont déjà morts depuis deux semaines, le gouvernement wallon a décidé en catastrophe de les remplacer discrètement par deux fonctionnaires détachés de l’administration. Afin d’éviter d’éveiller les soupçons des autorités chinoises, il est donc demandé à tous les futurs visiteurs des pandas de respecter les précautions suivantes :
- D’abord, ne lancez pas de pousses de bambous dans leurs enclos ! Les deux fonctionnaires ont subi un entraînement intensif à en manger, en multipliant les dégustations de salons en rotin, mais ça leur provoque beaucoup d’échardes dans les gencives.
- Ensuite, ne leur jetez pas de cannettes de bière, surtout aux heures de pause de l’administration à 10 et 15 heures. Les Chinois risquent de comprendre qu’il s’agit de fonctionnaires wallons.
- Ne tirez jamais non plus sur leur tête en les caressant, elle se déboîte. Sans leur tête en peluche, il y a de fortes chances que les deux fonctionnaires remplaçants soient démasqués. Des pandas avec de la couperose qui sentent le pâté gaumais, ça risque de paraître louche !
- Enfin, le plus important : ne vous adressez pas à eux en leur criant « Jean-Yves » et « Geoffrey ». Les Chinois vont se douter que vous les connaissez. Pour les reconnaître sans citer leur nom et les saluer discrètement, il y a un moyen infaillible : Jean-Yves qui a trente ans d’ancienneté dans l’administration wallonne, c’est celui qui regarde sa montre toutes les dix minutes et Geoffrey qui vient d’entrer en service, c’est celui qui joue à Candy Crush sur son téléphone portable de 8 à 17 heures.