Pendant une quinzaine d’années, Dominique Watrin a publié mensuellement sur ce site une chronique « coup de poing » sur une sujet majeur (ou mineur) inspiré par l’actualité chaude (et quelquefois simultanément glaciale) du mois. Ces textes parfois repris sur les planches pour des cours de seul-en-scène, parfois même étudiés dans les écoles, mêlaient faits de société, vérité pas bonne à dire et mauvaise foi à peine dissimulée, le tout sous une forme courte, choc, mais incroyablement digeste. À lire ou à relire… pour le plaisir ou le déplaisir !
Ne nous voilons pas la face : le prix du carburant est comme le cavalier acharné ou la prostituée rentable : il n’arrête pas de monter. Et, comme la prostituée rentable, celui qu’il fait trinquer, avant de nous servir l’essence (les sens), c’est notre portefeuille. Puisque personne ne le fait, je voudrais prendre la défense des principales victimes oubliées de la hausse du prix du baril. Avec mon organe majeur (pas de sourire lubrique, je vous en prie), je veux être la voix des sans voix, le transport des sans transport, le chauffage des sans chauffage, le malin vecteur des convecteurs, le poêle des sans poêle, et tout qui connaît ma pilosité, autre que faciale, conviendra que c’est un fameux exploit !
- D’abord, les chauffeurs de bus. Imaginez la honte qui les envahira sous peu lorsque, après une action de grève spontanée de leur front commun syndical, ils réaliseront qu’ils ont bloqué machinalement, pendant un mois, dans les dépôts, leurs bus qui ne roulaient de toute façon plus, faute de carburant !
- Les fumeurs, ensuite. Déjà durement touchés par l’augmentation du prix des cigarettes, seront-ils à nouveau frappés de plein fouet par celle du prix de l’essence des briquets qui les contraindra à ne plus pouvoir allumer leur cigarette qu’avec la précédente, ce qui peut nuire gravement à leur santé ?
- Les pyromanes. Allumer un incendie de forêt leur coûtera-t-il bientôt plus cher que l’achat du Canadair utilisé pour l’éteindre ? Sans oublier que la possible extinction (sans jeu de mots) de la race des pyromanes poussera au chômage des milliers de pompiers, tous responsables d’un foyer, dont certains, pour pouvoir travailler, sont déjà contraints aujourd’hui d’en allumer eux-mêmes, des foyers.
- Enfin, les crématoriums. Seront-ils acculés à réclamer la réquisition des réserves stratégiques nationales de charbon de bois destinées aux barbecues ou la réouverture des mines wallonnes pour achever, aux boulets, la combustion de nos grands-parents qui en sont déjà suffisamment sans ça, des boulets ?
Finalement, ce qui me dégoûte le plus, en tant que consommateur, c’est que la hausse du prix des carburants n’a aucun impact sur les allumeuses. Normal, puisqu’elles fonctionnent au sex-… appeal !