Pendant une quinzaine d’années, Dominique Watrin a publié mensuellement sur ce site une chronique « coup de poing » sur une sujet majeur (ou mineur) inspiré par l’actualité chaude (et quelquefois simultanément glaciale) du mois. Ces textes parfois repris sur les planches pour des cours de seul-en-scène, parfois même étudiés dans les écoles, mêlaient faits de société, vérité pas bonne à dire et mauvaise foi à peine dissimulée, le tout sous une forme courte, choc, mais incroyablement digeste. À lire ou à relire… pour le plaisir ou le déplaisir !
À chaque rentrée des classes, pour les parents modernes et prévoyants, il convient d’anticiper l’échec de leur enfant, en préparant l’explication crédible pour justifier son échec face à ceux qui les assomment, chaque année, de leurs « Et alors, ça a été, les examens ? ». Voici la liste des excuses les plus rentables pour vous en sortir, chers parents, au terme de cette année scolaire qui commence.
Première excuse : « Son problème, c’est qu’il a trop de facilités. »
Que votre rejeton soit bête comme un bigorneau ou mou comme un chamallow, l’important, c’est de donner le change. Si votre interlocuteur fait mine de ne pas croire en cet argument, ajoutez immédiatement « J’étais comme ça aussi », il sera obligé de se taire. La variante de cette excuse est : « Il a été testé « haut potentiel », mais j’ai préféré le laisser dans l’enseignement classique. »
Deuxième excuse : « L’école, ça n’a jamais été son truc. »
Sous-entendez alors lourdement que le talent de votre enfant lui interdit de s’abaisser à répondre à des questions mathématiques ou orthographiques futiles posées par des enseignants qui ne cherchent qu’à le piéger. Par contre, évitez de spécifier que, si son truc, ce n’est pas l’école, c’est parce que son truc à lui, c’est le racket en récréation et le harcèlement sexuel sur Facebook.
Troisième excuse : « L’école n’est plus adaptée aux enfants d’aujourd’hui. »
Précisez combien, pour votre enfant, devoir écrire à longueur de journée quand il a les pouces exténués par des nuits de jeux vidéo en ligne est une torture inadmissible. Et ajoutez que, si l’école avait accepté de lui rendre les douze smartphones et les sept tablettes numériques qui lui ont été confisqués pendant les cours, ça l’aurait certainement motivé à réussir.
Quatrième excuse : « Il n’avait pas pris sa Rilatine à l’examen. »
La Rilatine, c’est la potion magique à la mode des élèves turbulents. Cette excuse est très pratique quand votre chérubin est tellement hyperactif qu’il a retourné tous les bancs de la classe quand l’enseignant lui a interdit l’utilisation de la calculatrice où il avait programmé toutes ses formules de maths, ou l’emploi du dictionnaire dans les marges duquel il avait recopié son analyse de livre pendant toute la nuit.
Cinquième excuse : « Il est dyslexique et les profs refusent d’en tenir compte. »
Cet argument n’expliquera pas pourquoi votre enfant a raté aussi en éducation physique, mais ça ouvrira la porte à l’introduction d’une plainte auprès de la Cour Européenne des Droits de l’Homme à Strasbourg. Omettez cependant soigneusement de préciser que, quand il a écrit « Petite bite » ou « Pute » en grand sur la farde de son voisin de classe, il n’a pas inversé les « b » et les « p », ni les « t » et les « d ».
Sixième excuse : « Depuis le début, son professeur ne l’aime pas. »
L’incompatibilité d’humeur avec un (ou des) professeur(s) est un maître alibi, puisqu’il est invérifiable. N’hésitez pas à charger ces professeurs incapables de s’adapter à votre enfant en les traitant de « psychorigide » ou, si ça n’est pas suffisant, de « malbaisé(e) », ça, c’est béton !
Et enfin, dernière excuse : « Il était dans une mauvaise classe. »
Les autres, c’est toujours un bon placement comme excuse. Le plus dur sera évidemment de trouver un élève qui a des résultats encore pires que ceux de votre enfant. Petite précision : cette dernière excuse est à éviter si l’enfant de la personne à qui vous parlez est… dans la même classe que le vôtre !
Bonnes excuses scolaires à tous !